Biographie : les frères Maserati

Biographie : les frères Maserati

Par Philippe Laguë

Contrairement à Ferrari ou Lamborghini, Maserati n’est pas l’affaire d’un seul homme, mais d’une fratrie. Rodolfo Maserati et son épouse, Carolina, ont sept fils, tous nés à Voghera, en Lombardie. L’un d’entre eux, Alfieri, meurt à l’âge d’un an mais le bébé suivant se voit attribuer le même prénom.

Passionné de mécanique, le paternel est le conducteur du train du roi d’Italie et il transmet sa passion à ses fils, qu’il emmène régulièrement dans sa locomotive.  Cinq des six frères Maserati deviennent des ingénieurs en mécanique; l’artiste de la famille, Mario, peintre et dessinateur, contribue, à sa façon, à l’entreprise familiale en dessinant son emblème, le célèbre trident. L’inspiration lui vient de la statue de Neptune qui trône au milieu d’une fontaine de la Piazza Maggiore, au centre de Bologne, tout près de l’atelier de ses frères.  Ladite statue est un des symboles de Bologne; de plus, Neptune incarne la force et la puissance.

Les autres frères ont « les deux mains dedans », comme on dit : ils construisent, réparent et pilotent des voitures de course. L’aîné, Carlo, travaille d’abord chez Fiat, puis chez Isotta-Fraschini, où le rejoignent, un à un, ses frères Alfieri, Bindo, Ernesto et Ettore. La tuberculose emporte Carlo en 1910. L’entreprise familiale, la Societa Anonima Officine Alfieri Maserati, un atelier spécialisé dans la préparation de voitures de course, voit le jour quatre ans plus tard, à Bologne.

Les frères Maserati sont appelés sous les drapeaux pendant la Première Guerre mondiale à l’exception d’Ernesto, qui s’occupe de la gestion de l’atelier familial, dans lequel sont fabriquées des bougies d’allumage pour les véhicules militaires.

Après la guerre, l’entreprise retrouve sa vocation originelle : les frères Maserati, menés par Alfieri et Ettore, construisent des moteurs et des voitures de course pour Isotta-Fraschini et Diatto. Alfieri a aussi des talents de pilote et il remporte plusieurs épreuves au volant des bolides qu’il prépare avec ses frères.

Le grand pas est franchi en 1926 : Alfieri Maserati décide de devenir constructeur, avec le soutien indéfectible de ses frères. La première Maserati, une voiture de Grand Prix motorisée par un V8 de 1,5 litre à compresseur, est baptisée Tipo 26 en raison de l’année de sa naissance. Deux ans plus tard, Alfieri subit un grave accident en course et il meurt de complications liées à ses blessures en 1932. La fratrie vient de perdre son leader.

Resté chez Isotta-Fraschini, où il a travaillé pendant 20 ans, Bindo Maserati prend les rênes de l’entreprise familiale, à titre de président. Ses frères Ettore et Ernesto se voient confier respectivement la direction technique et financière. Las, les trois frères sont de piètres gestionnaires et ils vendent leurs parts à la famille Orsi, des industriels de Modène, en 1937. Par contrat, ils restent liés à l’entreprise pour 10 ans, s’occupant du volet technique. Adolfo Orsi devient le président de Maserati, qu’il déménage à Modène en 1940.

Entretemps, la marque au trident continue d’accumuler les succès sportifs, remportant notamment les 500 Milles d’Indianapolis deux années d’affilée, en 1939 et 1940. Puis, la Deuxième Guerre mondiale éclate et Maserati doit se consacrer de nouveau à la fabrication de bougies. Le Jour de la marmotte, version automobile…

À la fin de leur contrat, en 1947, les frères Maserati quittent l’entreprise qui porte leur nom pour fonder OSCA (Officine Specializzate Costruzione Automobili) à San Lazzaro, en périphérie de Bologne. L’aventure va durer 20 ans, pendant lesquelles les trois frères développent un nouveau créneau, celui des voitures de courses à petites cylindrées. Ce qui ne les empêche pas d’ajouter les 12 Heures de Sebring à leur palmarès en 1954, grâce au légendaire pilote britannique Stirling Moss.

Pendant ce temps, Maserati décide de se retirer de la compétition pour se reconvertir dans la fabrication de voitures de sport routières, les fameuses GT (de l’appellation italienne gran turismo). Lancée en 1957, la 3500 GT est la première d’une longue série de GT qui feront la renommée de la firme de Modène. Comme Lamborghini et Ferrari, la marque au trident a traversé des années tumultueuses et survécu à plusieurs changements de propriétaires dans les années 70, 80 et 90 : Citroën, De Tomaso, Chrysler…

Depuis 1993, Maserati fait partie de l’empire Fiat, qui contrôle le groupe FCA (Fiat-Chrysler). Alfa Romeo et Ferrari font également partie de FCA. Alors qu’elle ne fabriquait même pas 2000 voitures par année au tournant du XXIe siècle, Maserati a connu une année record en 2016, avec une production de plus de 42 000 véhicules.